Charles PÉguy, L’Argent, présentation d’Antoine Compagnon, Éditions de l’Équateur, 2008, 104 p., 10 €

 

Voici réédité en poche, et sous la couverture attrayante d’une Semeuse des anciens nouveaux francs, le 6e cahier de la XIVe série des Cahiers de la quinzaine de Charles Péguy, avec une petite présentation : « Beaux comme des hussards noirs » due à Antoine Compagnon et dans laquelle le professeur au Collège de France présente la réédition de L’Argent comme engagée dans le contexte de l’année 2008, où la règle de trois n’est parfois pas sue en CM2 et où l’on parle de réformer profondément les recrutements des enseignants. Peut-être lui doit-on également la quarantaine de notes expliquant les allusions du texte ou établissant une rapide biographie des personnes évoquées, qui figurent commodément en bas des pages. Mais ces notes, fort utiles, sont pour l’essentiel un condensé des propres notes de Robert Burac, auquel d’ailleurs il est fait une fois renvoi.

Quelques dates auraient pu être précisées, moyennant quelques recherches supplémentaires ; nous les donnons ici : Gustave Fautras (185.-1931), Théophile Naudy (1847-1928), Edmond Simore (186.-193.) ; c’est peu… Trois Michaud sont possibles pour correspondre au Michaud (18..-19..) qu’a eu Péguy comme enseignant en 1887-1888 : Antoine Michaud (en 1879 agrégé de grammaire), Louis Michaud (1880, grammaire), Stanislas Michaud (1880 ; agrégation de l’enseignement secondaire spécial en littérature). Car enfin Edmond Simore est agrégé de grammaire en 1884 (Péguy l’a eu en 1885-1886), Jules Doret en 1881 (Péguy l’a eu en 1886-1887), Paul Glachant en 1887 (Péguy l’a eu en 1888-1890)… Le refrain « J’en ai oublié bien d’autres, / Joublierai bien celui-là ! » (p. 48 ; C 800) appartient à une chanson populaire, mais laquelle ? « La Rose et le Rosier », écrit R. Burac ; « J’ai un long voyage à faire » ou « La Belle et le Rossignol », écrit A. Compagnon ; nous n’avons pas à choisir ici, puisque les chansons populaires connaissent de nombreuses variantes et que l’attribution à un texte précis, le souci de la référence juste, louable en littérature, est caduc en folkloristique.

Un petit sondage montre des écarts textuels mineurs avec l’édition de La Pléiade : « Seize-Mai » (p. 63) au lieu de « 16 Mai » (C 808), « la Ligue » (p. 66) vs « la ligue » (C 809), « De Jean Coste » (p. 74) vs « De Jean Coste » (C 814), la typographie d’une citation de Luc (p. 77 ; C 815). Le plus important étant que le texte est arrêté au « mètre courant » de la page C 828, alors que Robert Burac publie le texte de L’Argent jusqu’à la page C 847 (25 pages !), incluant l’ajout de dernière minute dont l’éditeur de 2008 indique en note la disparition, sans la justifier (p. 101). Aussi n’est-ce pas le texte intégral de L’Argent que nous lisons ici.

On offrira néanmoins ce petit volume soigné, pour faire découvrir le Péguy prosateur à ses amis, d’autant plus qu’approchent les fêtes de fin d’année.

 

Romain Vaissermann