Bernard Collignon, Pourquoi
ont-ils tué Péguy ?, Latresne, Le Bord de l’eau,
« Documents », 2005, 140 p. 14 €
Cet essai au titre choc, mêlé de confidences autobiographiques, constitue un vivant plaidoyer qui se lit bien mais qui, de son propre aveu, ne nous apprend rien de bien nouveau sur l’écrivain ni sur son époque (p. 133). Je n’ai relevé qu’une erreur factuelle : le Mystère de la charité de Jeanne d’Arc est daté de 1897 par confusion avec Jeanne d’Arc (p. 17), en regrettant une injustice dans cette remarque faite en passant et censée nous désigner : « Rien de plus exaspérant d’entendre parler de Péguy (et c’est presque à toutes les fois) comme d’une grenouille de bénitier […]. Même et je me demande parfois si ce n’est pas surtout parmi les spécialistes. » (p. 25). Tout ceci au milieu d’une prose d’une belle sincérité, ce qui vaut beaucoup : prose écrite comme on parle, à tâtons parfois, ce qui n’exclut pas une vue très juste sur le cliché de Péguy appelant à tuer Jaurès (p. 94) ou sur le « Lagarde et Michard » (p. 137). Quant à moi du moins, je suis en mesure de rassurer l’auteur en apportant un démenti : « Quant aux spécialistes de Péguy, les gens sérieux, le plus vraisemblable n’est-il pas en vérité qu’ils aient depuis longtemps abandonné ma trace ? » Non, non, cher franc-tireur venu à la rescousse de Péguy. Puissions-nous ne pas ressembler aux deux mauvais lecteurs de l’œuvre de Péguy : le partisan qui l’enfume d’encens, l’opposant qui l’accuse de fasciste.
Romain
Vaissermann