Agnès Joste, Contre-expertise d’une trahison. La réforme du français au lycée, préface d’Henri Mitterrand, Mille et une nuits, 2002, 266 pp. – 12 

 

Analysant les textes officiels qui redéfinissent depuis 1999 l’enseignement du français au lycée, l’ouvrage s’attaque à l’idéologie des experts de l’éducation, faiseurs de programmes. L’auteur, membre du collectif « Sauver les lettres » (dont on visitera le site www.sauv.net), n’évite pas toujours attaques ad hominem ni répétitions mais réussit à élever le débat à partir de textes censés être disciplinaires mais qui n’évitent pas les incohérences théoriques. La mort « programmée » de la littérature provient de la méconnaissance voire du mépris des nouveaux élèves comme des enseignants, d’une vision utilitariste de l’enseignement, d’une littérature réduite à la rhétorique. L’apprentissage raisonné du français est massacré avant même la littérature, au motif que grammaire et orthographe sont des inégalitaires, sélectionnant les élèves d’après leur capacité mémorielle. Plus que jamais lettre et esprit sont unis, parce qu’ils sont menacés : pour ne pas renvoyer les élèves à leur origine sociale, il faut revenir à un enseignement du français attaché aux vraies œuvres, à une lecture du sens, à l’histoire littéraire, à la culture. Enseignants et parents d’élèves tireront grand profit de l’ouvrage, en attendant que les professionnels de la pédagogie acceptent courageusement de tirer elles aussi profit de cette saine critique.

 

Romain Vaissermann